NOUS PROTÉGEONS LES ÉLÉPHANTS EN THAÏLANDE
Nous apportons un soutien humain et financier à une réserve d’éléphants en Thaïlande qui a fait le choix d’extraire du circuit touristique, cet animal emblématique. Cette initiative s’inscrit dans notre programme de protection des espèces menacées INAUDIBLE VOICES. Hélène Lecompte, Vice Présidente de notre association Free Spirit Foundation, était au sein de l’une des réserves naturelles que nous soutenons en Thaïlande. Afin de partager avec vous son retour d’expérience, découvrez son récit :
« Notre journée au sein du parc pour éléphants a été une expérience très forte en émotions. Ce fût une journée privilégiée et mémorable.
Cette réserve est gérée par une fondation à but non lucratif, dirigée par Mrs Sangdeaun Lek Chailert, jeune femme Thailandaise, née en 1961 dans un village situé dans le Nord de Chiang Mai.
- Son grand-père était shaman dans son village. Lek l’a beaucoup accompagné dans son enfance et a appris à ses côtés à respecter les animaux.
- Lek s’est beaucoup intéressée à la cause des éléphants d’Asie et son opinion pèse aujourd’hui un très gros poids à l’international. Elle travaille auprès des grandes structures influentes comme National Geographic, BBC…
- Lek a été nommée par le Hillary Clinton comme l’une des 6 femmes les plus influentes dans la conservation de la planète (entre autres).
J’ai choisi la fondation de cette femme-héro car son approche humaine, respectueuse et bienveillante m’a beaucoup touchée.
La fondation s’occupe de récupérer des éléphants maltraités issus des cirques, des zoos ou des centres pratiquant le « locking » (technique d’asservissement où les éléphants ont les pattes attachées par des chaînes et sont maintenus debout nuits et jours sans pouvoir marcher, bouger ni se coucher) ou quelconques asservissements en tous genres.
L’ambition de Lek et des bénévoles et employés du centre est de soigner les éléphants pensionnaires, les aider à retrouver des conditions de vie décentes mais surtout de leur apporter l’amour dont ils ont été privés.
La fondation est organisée sur plusieurs sites : un parc principal puis plusieurs parcs satellites dans différents villages dans lesquels sont répartis les éléphants en fonction des programmes qui leurs sont dédiés (allant de soins médicaux intensifs, ou plus légers jusqu’aux simples suivis routiniers).
Ici, les éléphants sont considérés comme des êtres vivants que l’on respecte.
Des espaces leur sont entièrement réservés et ce sont leurs espaces personnels. Si l’homme ni est pas invité, il n’y rentre pas. L’idée défendue par la fondation : la cohabitation, pas la soumission.
La fondation a fait le choix d’une approche pédagogique.
En arrivant, tous les visiteurs sont sensibilisés puis formés. Sensibilisés sur la condition des éléphants en Asie mais aussi sur les problématiques auxquelles ils sont confrontés (trafics, maltraitances, exploitations).
Puis, nous sommes formés. A notre arrivée dans le parc, nous apprenons tous à communiquer avec eux : les gestes qu’il faut faire et ceux qu’il ne faut pas faire.
Il nous est également rappelé que les éléphants sont avant tout, des animaux sauvages. Ils sont plutôt « agressifs » car façonnés pour vivre en troupeau entre membres d’une même espèce.
Si un éléphant ne souhaite pas être approché, il ne le sera pas. Ici l’éléphant est « roi ». Les éléphants ne sont en aucun cas forcés de suivre un rythme, un parcours et un programme. Ceux que nous pouvons approcher sont les plus dociles du parc et identifiés comme étant les plus « sociables ». Notre présence humaine est acceptée et vu comme une présence amicale.
NOTRE JOURNÉE EN 3 ÉTAPES
1/ LE MATIN DÉDIÉ À LA PRÉPARATION DES REPAS
Le repas se compose tout d’abord d’une mise en bouche : pastèques / bananes fraiches. Nous tranchons donc les pastèques en quarts. Chaque éléphant a sa propre ration ; et certains, souffrants de séquelles datant de leur ancienne vie, bénéficient même d’un traitement particulier : nous leur épluchons les pastèques car leurs dents sont trop fragiles pour broyer la peau coriace de la pastèque.
Ainsi, chaque éléphant bénéficie d’une attention particulière en fonction de son histoire, son passé et ses besoins.
2/ VIENT L'HEURE DU VRAI DÉJEUNER
Au menu : boulettes de riz, de bananes écrasées et de sel que nous leur préparons avec amour. C’est avec avidité qu’ils engloutissent tous leurs 3 boulettes hyper vitaminées.
Nous partageons alors un moment unique car ce geste nous permet de nouer une relation privilégiée, de créer un lien qui instaure une confiance entre nous et l’animal.
C’est ainsi que commence la journée pour que les éléphants nous laissent le droit de les accompagner et passer la journée en leur compagnie avec leur accord.
Notre déjeuner, préparé par la population locale et servi au cœur de la foret. Un moment de paix, de partage et de recueillement.
3/ BAIN DE L'APRÈS MIDI
Nous pouvons donc nous diriger vers la forêt et commencer une marche digestive impressionnante. Marcher à côté de ces montagnes, c’est se sentir minuscule et vulnérable. Mais leur présence est agréable car ils sont doux. Ils se déplacent lentement, dans des mouvements amples comme au ralenti, nous sentons qu’ici ces grands géants sont les maîtres.
J’ai ressenti notre présence presque comme un amusement. Comme si finalement, nous étions l’attraction qui les divertissait. Les éléphants ne semblaient pas dérangés par notre présence car nous marchions les uns avec les autres dans un groupe homogène sans contrôle, tension ni agressivité.
Nous avons même pu parfois être témoins de leur espièglerie car ces gros mangeurs raffolent des bananes que nous avions dans nos sacs et n’hésitaient pas à tendre la trompe !
Nous avions beau cacher et économiser nos ressources en bananes, ils ont toujours su trouver le chemin vers nos sacs en toile.
Arrivés à la rivière, cette fois encore nous avons eu le privilège d’observer les éléphants se rafraichir. Ils n’ont pas hésiter à descendre dans la rivière pour y tremper les pattes (l’eau à cette période n’est pas particulièrement chaude – nous sommes en hiver, le bain est donc court pour un léger rafraichissement).
Ils nous ont laissé les asperger et cela semblait être un moment de plaisir pour eux. Je n’ai jamais ressenti de stress de leur part à ce moment-là ou de panique, de peur.
Puis, une fois bien rafraichis, c’est à la demande des éléphants que nous avons repris le chemin. En effet, ce sont eux les décideurs et c’est sur leur demande que modulons le planning de la journée. Ainsi, dès qu’ils sortirent de l’eau, nous avons stoppé le moment du bain et repris la route pour rentrer.
4/ LE RETOUR ET LA PRISE DE CONSCIENCE
De retour au parc, nous quittons les éléphants pour les laisser vaquer à leurs occupations annexes. En direction du bâtiment central, cœur du centre, le guide nous montre tous les « enclos » des éléphants. En effet, tous sont rentrés la nuit dans des enclos individuels afin d’éviter tout problème de confrontation entre eux ou de fuite qui pourraient engendrer de gros problèmes de « voisinage ».
En effet, les éléphants ne s’entendent pas tous entre eux, ils ont leur caractère et n’hésitent pas à le faire entendre. Il arrive que certains éléphants se battent pour s’affirmer.
Encore une fois, le guide nous explique que l’éléphant est avant tout un animal sauvage.
Ces enclos sont propres, nettoyés tous les jours et même « aménagés » pour que l’éléphant bénéficie du meilleur accueil. Une petite dune de sable est par exemple structurée chaque jour afin que l’éléphant puisse se coucher sur le côté s’il en a envie, sans devoir s’écrouler de tout son poids sur le sol et puisse se relever facilement.
Ce sont des détails mais ici tout est orchestré pour que les éléphants bénéficient d’une vie tranquille, paisible et facile.
Alors certes, ces éléphants dorment dans des « enclos », mais il ne faut pas oublier qu’ils ont tous énormément soufferts toute leur vie, jusqu’à être dépossédés de leur âme. Malheureusement, il est très difficile de rendre à ces éléphants ce qui leur a été volé, même impossible. Ce sont des animaux qui ont perdu une grande partie de leur instinct et qui ne
peuvent plus être remis en liberté. Ils seraient complètement perdus car l’Homme leur a retiré toute capacité de se comporter en éléphant. Vulnérables et devenus dépendants ils seraient confrontés à leurs paires qui n’hésiteraient pas à les mettre en marge car différents. La loi de la Nature ne pardonne pas.
En revanche, il est toujours possible d’atténuer leurs souffrances (car nous ne pourrons jamais réparer ce qui s’est produit) et leur proposer le meilleur à partir du moment où ils entrent dans la fondation.
C’est en effet la mission première de ces fondations ou refuges. Ils tentent de soigner par l’amour, et le bien-être. Mais leur existence est surtout importante pour pouvoir sensibiliser et faire changer les mentalités.
Toute la journée, nous ne nous sommes pas sentis comme des touristes en visite dans un zoo mais plutôt comme des « apprentis » ici pour comprendre le quotidien des éléphants d’Asie. Nous avons vécu au rythme de la fondation pendant une journée. Autour de nous, pas de touristes qui s’extasient devant des enclos d’animaux mais des bénévoles et des familles locales qui travaillent toutes pour le centre.
Tous, étaient affairés à une multitude de tâches (préparation des repas, nettoyage des enclos, soins, rangement).
Sur la route, nous croisons d’ailleurs la petite camionnette de l’équipe vétérinaire en plein travail.
Les vétérinaires visitent chaque jours les éléphants qui ont besoin de soin. Ils suivent de très près leur évolution, leur guérison.
Le guide nous explique que soigner les éléphants est une tâche extrêmement difficile car leur peau est tellement épaisse que leur cicatrisation est extrêment lente. Les risques d’infection sont donc importants.
De plus, il est presque impossible d’endormir un éléphant pour l’opérer. La dose de somnifères nécessaire mettrait en danger sa santé et son poids ne lui permet pas de rester allongé très longtemps.
En résumé, la présence quotidienne des vétérinaires est essentielle et leur travail est délicat.
Enfin, le guide clôture la journée en nous montrant avec fierté l’évolution positive de l’état physique et moral de chaque éléphant présent dans le centre. Nous voyons des photos avant/après qui n’ont pas besoin de mot pour voir clairement que leur situation s’est largement améliorée.
Sur le chemin du retour vers la voiture, pas de boutique de touriste. Je me souviens avoir été surprise, agréablement. Une fois de plus, nous ne nous sommes pas ici des touristes mais des volontaires. Nous étions ici pour découvrir l’éléphant, son univers, sa vie difficile mais parfois heureuse aussi.
Notre guide nous a chaleureusement remercié pour notre présence. Il nous a également détaillé à quoi sera employé l’argent que nous avons dépensé pour cette journée:
>Entretien de la fondation
>Rémunération des familles locales qui travaillent dans le centre >Soin pour les éléphants et investissements dans les infrastructures >Nourriture pour les éléphants
Le retour se fait en silence, des images plein la tête sur cette journée magique. Nous sommes tous remplis d’émotions et encore plongés dans l’univers de ces grands géants pourtant si vulnérables.